Canicule : « Ils sont mis à l’épreuve »… Dans les prisons françaises, les détenus subissent eux aussi les fortes chaleurs
Publié le 2 juillet 2025 par: Être Heureux
Alors que la France suffoque sous une nouvelle vague de chaleur, la situation dans les prisons devient alarmante. Derrière les murs surchauffés des établissements pénitentiaires, la canicule aggrave des conditions de détention déjà critiques. Surpopulation, infrastructures vétustes et manque d’aménagements rendent l’été particulièrement éprouvant pour les détenus.
Le chiffre est sans appel : 84 447 personnes incarcérées pour 62 566 places. Cela représente un taux d’occupation moyen de 135 %, et même plus de 200 % dans 22 établissements, selon les données du ministère de la Justice au 1er juin 2025. Dans 70 prisons, la densité dépasse les 150 %, forçant plus de 5 760 détenus à dormir à même le sol, sur des matelas. Dans ces conditions, la promiscuité devient insupportable, surtout en période de canicule.
Des cellules surchauffées et mal ventilées
Les établissements les plus anciens souffrent d’un isolement thermique catastrophique. Beaucoup de cellules sont dépourvues de climatisation, mal aérées, avec des fenêtres en hauteur ou partiellement obstruées, rendant l’air irrespirable. Les détenus peuvent passer jusqu’à 22 heures enfermés dans des pièces de 9 m², souvent partagées à trois. « Dans certains quartiers d’isolement, les fenêtres ne laissent passer qu’un filet d’air », alerte Odile Macchi, responsable au sein de l’Observatoire international des prisons (OIP). Des malaises et troubles respiratoires ont déjà été signalés, confirmant l’urgence de la situation.
Un plan canicule limité dans ses effets
Depuis plusieurs jours, un plan canicule a été déclenché dans toutes les prisons françaises, indique la Chancellerie. Il prévoit un accès élargi aux douches, un ajustement des horaires de promenade et de sport, ainsi qu’une attention particulière portée aux détenus fragiles. Mais sur le terrain, ces mesures restent très insuffisantes, faute de moyens humains et d’infrastructures adaptées. « Les surveillants ne peuvent pas accompagner tout le monde à la douche, ils sont déjà débordés », regrette Odile Macchi.
Des infrastructures inadaptées au dérèglement climatique
Le réchauffement climatique, désormais durable, n’a pas été anticipé dans la conception des établissements récents. Selon l’OIP, les cours de promenade restent bétonnées, sans arbre, sans ombre, ni végétation. Dans certaines prisons, les fenêtres sont volontairement réduites pour des raisons de sécurité, aggravant encore les effets thermiques à l’intérieur des cellules. Ce déficit d’adaptation rend chaque épisode de chaleur plus brutal et insupportable, surtout pour les détenus souffrant de pathologies chroniques.
Une souffrance psychologique invisible
Au-delà de la chaleur physique, la santé mentale des prisonniers se détériore dans ces conditions extrêmes. L’OIP tire la sonnette d’alarme : « Ils sont mis à rude épreuve psychologiquement, quotidiennement. » Le plan canicule prévoit des réveils nocturnes pour surveiller certains détenus vulnérables, mais ces interruptions du sommeil peuvent devenir contre-productives, voire nocives pour l’équilibre mental des personnes concernées.
Des tensions contenues mais persistantes
Contre toute attente, la canicule ne semble pas exacerber les tensions entre détenus et surveillants. « Au contraire, la chaleur a un effet amorphe, les gens sont plus calmes », observe Christy Nicolas, du Syndicat pénitentiaire des surveillants (SPS). Des initiatives locales comme l’installation de brumisateurs dans les cours ou l’humidification artisanale des cellules avec des serviettes mouillées sont encouragées. Un apaisement fragile, qui ne masque cependant pas les limites structurelles du système carcéral français.
